Botte secrète

En ces temps conjugués d'avent et de crise morale du pouvoir d'achat, je me suis dit qu'un soupçon de frivolité ne nous ferait pas de mal. Aussi, ai-je décidé de vous parler aujourd'hui d'un incontournable falbala de l'éternel féminin : la botte.

"Jusques en haut des cuisses, elle est bottée et c'est comme un calice à sa beauté".

Première constatation : la botte résiste au cliché. A chaque fois que l'on essaie de s'en approcher subrepticement, l'appareil photographique à la main, elle prend immédiatement une pose avachie. Elle n'adopte un air sémillant que lorsqu'on la prend sur et en pied. Votre reporter, qui ne souhaitait pas exhiber son mollet sur la toile, a dû user de stratagèmes inventifs mais contraignants (bouts de scotch) pour lui donner un air un peu plus présentable. Néanmoins, comme les miennes ont été beaucoup portées, peu nettoyées et mal rangées, elles ne sont guère présentables. Peu importe, considérons qu'elles ne sont que de pâles illustrations du concept de botte, le mystérieux "ça botté" que nous tenterons d'explorer ensemble.

Car Kalliope chaque année achète une paire de bottes, et chaque année en est déçue ; elle en vient toujours à se promettre d'engager une recherche plus méthodique et plus réfléchie l'année suivante, avant de laisser libre cours à ses pulsions pendant les soldes. Cette quête du graal bottesque a fini par donner sens à ses hivers glacés, et même au printemps, car la botte parfaite peut se porter été comme hiver, surtout à la BNF où il fait en permanence 15 degrés.

Premier problème : quelle couleur choisir ? de l'orange aux tons plus classiques, marron et noir, en passant par l'aubergine, tous les coloris sont permis, à conditions qu'ils soient assortis. Adepte du noir et blanc vestimentaire, Kalliope a toujours choisi du noir, bien qu'elle soit périodiquement tentée par le marron.

Deuxième problème : où chercher ? dans le vaste terrain de chasse parisien ou dans le périmètre plus réduit d'une ville de province chère à votre coeur ? La deuxième option ouvre le champ d'une recherche exhaustive. Néanmoins, l'entourage de Kalliope ne supportant plus sa manie accumulative, elle préfère désormais oeuvrer dans la discrétion parisienne.

Exemple 1

La première année, un peu timide, Kalliope voulut une botte élégante et presque invisible. Elle choisit un modèle ultracollant noir, en je sais pas quoi mais pas en cuir, hauts talons, épousant parfaitement la cheville, sans un pli.

L'ennui, c'est que le tissu extensible est vite devenu étirable et a perdu de son élasticité. Quelques mois plus tard, en cinq minutes, la botte descendait au milieu du mollet en faisant plein d'haïssables plis. Je passais mes journées à maugréer et à tirer sur mes bottes.

Exemple 2

La deuxième année, Kalliope, nullement découragée et un peu moins timorée, choisit un modèle beaucoup plus roots, en peau de nubuck (animal bien connu du grand Nord), avec crochets. L'avantage, c'est que cette botte était tout terrain, avec elle on pouvait passer partout. L'ennui, c'est qu'elle ne s'est jamais totalement remise de sa rencontre avec l'océan. Surtout, Kalliope ayant "la cheville et le mollet fins" (sic), à moins qu'elle ne la porte avec trois jeans superposés, il y avait toujours un large espace entre le mollet et la botte (qui lui a fait imaginer de développer le concept de botte-sac) pas très esthétique. Quand elle va essayer des bottes, les vendeurs le lui reprochent parfois "ah oui, mais avec vos mollets aussi..." au point qu'elle finit par leur rétorquer qu'elle s'entend très bien avec ses mollets, merci, et leur claquer leurs bottes trop grandes au nez.

Exemple 3

La troisième année, Kalliope a évoqué l'épineux problème avec une amie très mince et dotée de très belles bottes, qui lui a indiqué une boutique "spécialisée mollets fins" (M° Ledru-Rollin si vous voulez l'adresse). Là-bas, elle a trouvé un moyen terme en cuir, des bottes étroites, qu'elle peut porter avec un jean ou avec une jupe. Sauf qu'elles ne vont pas avec les jupes, parce qu'avec leurs lacets et leur absence de talon, elles font un peu trop sport....

Pour l'instant, Kalliope a donc les placards encombrés de bottes imparfaites et, cabotine, passe une partie de l'hiver en ballerines, à faire du lèche-vitrine selon les bonnes habitudes féminines. Elle se console en se disant que ça vaut toujours mieux que de lécher directement les bottes, comme le font nombre de nos grands hommes (et femmes). 

Comments

[Alain]

J'aurais jamais cru qu'on puisse écrire autant sur des bottes.

[JSA]

Ca faisait longtemps que je n'étais pas passée dans le coin et, joie, je trouve ici une compagne d'infortune et de mollets de coq. Oui, chère Kalliope, vous êtes un K et moi aussi. Personnellement, très portée sur la botte aussi (ne dit-on pas "proposer la botte"?), j'ai englouti dans cette sorte godasse la dette de l'Afrique toute entière. C'est mal, je sais. Mais du coup j'ai des cavalières Free Lance (dette du Burkina) et des talons vertigineux Costume National (dette du Mali). J'évoquerai pour finir une expérience désastreuse avec des Antik Batik pour André (dette de Neuilly) que mon gros pied (j'ai le mollet fin mais le pied large) a dévasté en trois sessions Franprix.
Biz cavalières.

[zelia]

je pense que oui pour répondre à la question ci-dessous...

sinon pour l'anecdote V vient de me ramener 1 4ème paire-gratuite tu t'en doutes- d'1 vert...pétant!
il faut que tu vois ça...

assez inmettable, mais comme rien ne me fait peur en terme de mauvais gout...

[Kalliope]

Chère Didoune, voudrais-tu dire qu'un jour, peut-être, je trouverai "botte à mon pied" ? ;-)

[didoune]

Peut-être que le propre de la botte, c'est qu'il ne faut pas la chercher, mais la laisser te trouver? Ce qui devrait bien finir par t'arriver!
En attendant, si tu ajoutes encore une ou deux paires de bottes (recherchées)dans ton placard, tu finiras quand même par en avoir une pour chaque occasion. Courage!